Il y a des mots dont on fait un usage trop systématique, parce qu’ils convoquent des imaginaires efficaces. Ils permettent la formation de lignes mélodiques entêtantes, sensées, parlantes. Ça marche, on a envie de taper du pied dessus, on est pris facilement, comme dans le roulis d’une eau légère. Or, écrire de la belle littérature, c’est peut-être explorer des combinaisons harmoniques, rythmiques, qui semblent au premier abord dérangeantes. D’un texte, il m’arrive parfois de vouloir aggraver ou plutôt approfondir (et non pas corriger) les lacunes relevées par mes relecteurs, comme si dans ces anfractuosités, dans ces maladresses, dans ces choses qui ne marchent pas, pouvaient se trouver quelques chemins littéraires : chemins où l’on ne va pas, où l’on ne va pas seul, mauvais lieux, mal-famés ; et quitter les chemins habituels, c’est-à-dire les usages banals, les expressions faciles. Voici ces mots qu’il faudrait que je m’efforce à ne pas employer, qui devraient être comme couverts d’un *bip* de censeur d’être qu’ils tomberont sous mes doigts :
enfant, enfance
territoire
monde
temps
arbre, forêt
corps
les jeux de mot